Agnès Desarthe, Le Remplaçant

Desarthe - Le RemplaçantTriple B vit encore, il vit toujours, à environ quatre kilomètres de chez moi, à Paris, dans sa tour, dans son lit. Il a survécu à la guerre, aux camps de prisonniers, à la dépression, à la maladie, à ses deux femmes, à ses amis. Son talent, c’est ça, survivre, aimer ça, oser aimer vivre.

Jusque dans son parking il avait développé une stratégie pour limiter les risques. Quand il remontait seul du troisième sous-sol en pleine nuit – au retour d’un dîner, par exemple – il prenait soin de crier à chaque étage, afin que la cage d’escalier répercute ses paroles : « Alors, les gars, vous venez ? » Armé de cette formule magique, dont il était certain qu’elle dissuaderait les pires malfaiteurs, craignant de se retrouver confronté à « une bande », il procédait à l’ascension le cœur paisible. Mon héros ne s’illustre pas dans les hauts-faits, il se contente d’être l’as de la débrouille.

Points, page 53

Autobiographie d’un imaginaire, vie d’un grand-père qui n’en est pas vraiment un, du moins pas par le sang. Dans une famille où les histoires s’inventent, se racontent et se vivent, ce personnage humble et touchant a trouvé une place bien à lui, au carrefour de l’amour, de la politique, de l’amitié et des idéaux.

Variation sur le thème de la famille juive, avec son passé et ses habitudes, symphonie humaine et ode à la vie, voilà ce que nous présente Agnès Desarthe en 76 pages. Dans un style direct où les mots ont un pouvoir certain, l’auteure nous réjouit, nous fait sourire tout en nous rendant mélancolique. Petites anecdotes jouxtent drames humains et familiaux dans ce roman savoureux et percutant.

De la même autrice, lisez Une partie de chasse, Ce qui est arrivé aux Kempinski, Poète maudit, Naissances, La Chance de leur vie et Je ne t’aime pas, Paulus.

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