« Vous ne verrez pas votre amante par la fenêtre, railla Antoine. Il fait jour, dehors. Gardes, éliminez-moi ce travelo. Je suis sûr que ça n’a même pas été capable d’activer le détonateur. »
Les gardes hésitèrent une fraction de seconde. Moi pas. Je visai celui qui était le plus près de moi et je tirai. Tandis qu’il s’écroulait, son collègue faisait feu à son tour, mais il me manqua à trois reprises, se contentant de faire exploser la vitre qui était dans mon dos et de faire des trous dans les rideaux. J’espérai une fraction de seconde que cela serait suffisant pour laisser passer des rayons de lumière qui, comme dans les films, auraient neutralisé le vampire. Malheureusement, il n’en fut rien : il était trop loin.
Le garde me manqua encore une fois ; de mon côté, j’ajustai mon coup et appuyai une nouvelle fois sur la détente, blessant suffisamment mon ennemi pour qu’il lâche son arme. Je ne suis peut-être pas très douée en combat rapproché, mais je crois que j’ai un certain talent pour le tir.
« Putain, râla Bull, mais pourquoi vous l’avez traitée de travelo ? Vous voulez vraiment qu’elle la fasse sauter, sa putain de bombe ? Vous auriez pas pu vous contenter de la traiter de sale gouine ?
– Toi, ta gueule », répliqua le vampire.
Dans nos histoires, pages 256-257
Il y a : des vampires, des garous, des trans, des lesbiennes, des motos, des cons, des femmes, encore trop de mecs, des punks, des gothiques, des sorcières, des chats et des hackeuses. La base. En tout cas pour une autobiographie transsexuelle avec des vampires. Ainsi donc, Cassandra, de son petit nom Cassie, débarque à Lille et est à la recherche d’hormones. Elle rencontre alors Valérie, 1,90 m et sorcière de son état, puis Morgue, vampire hargneuse mais attachante, et Sigkill, bien plus qu’une simple geek ou qu’une commune nerd. Elle se lie également avec d’autres créatures extra dans l’ordinaire, membres d’une association culturelle dite les Hell Butches ou Hell Bitches, selon les préférences des unes ou des autres. Association culturelle où malheureusement elles se font de temps en temps décimer, mais elles dézinguent en retour et se marrent bien. Enfin bref, Cassie va à la fac, boit des coups au From L, prend des hormones, apprend à se défendre face aux connards et, de temps à autre, butte des méchants. Une femme normale avec une vie normale quoi.
Quel plaisir d’entrer dans un monde où vampires, loups-garous et sorcières sont monnaie courante, sans besoin d’explications. Quel plaisir de lire un livre dont le personnage principal est une transsexuelle. Quel plaisir une succession de pages où il n’y aucune morale, aucun frein d’ordre éthique ou rationnel. Lizzie Crowdagger parle du sexisme, de l’homophobie et de la transphobie ambiants, quotidiens et totalement admis, et y répond à coup de boule et de feu. On rit, c’est irrévérencieux à souhait, c’est politique et politiquement incorrect, et on rit encore. Un pas de côté qui fait beaucoup de bien.
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