Martin Winckler, La Maladie de Sachs

Winckler - La Maladie de Sachs– Asseyez-vous.

Tu te diriges vers le bureau, tu t’assieds sur le fauteuil à roulettes. Tu refermes le grand livre rouge ouvert devant toi, tu déplaces un bloc d’ordonnances. Tu pivotes vers moi, tu poses le coude gauche sur le plateau de bois peint, tu lèves les yeux. Tu souris.

– Asseyez-vous, je vous en prie.

Pendant que je m’exécute, tu demandes sur un ton bienveillant :

– Que puis-je faire pour vous ?

Je cherche mes mots.

Folio, pages 21-22

Dans le cabinet du docteur Sachs, les clients défilent. Les uns après les autres, ils égrainent leurs douleurs – toutes différentes, toutes importantes. Ce sont des douleurs du quotidien, des maux courants, et puis, parfois, des maladies plus graves. Sans distinction, il écoute et il soulage. Il fait tout son possible. Sa sincérité pend parfois la forme d’un rachat : une rédemption pour le corps médical sourd à la souffrance, qui souvent soigne – ou tente de soigner – les maladies, mais très rarement les patients. Car plus encore qu’un médecin, il est un soignant.

La Maladie de Sachs est un roman à la deuxième personne. Ce parti pris est puissant et efficace : Bruno Sachs devient une sorte d’alter ego. On ne le connaît que par ce que les autres perçoivent de lui. Mystérieux, il est la source de bien des curiosités. Il ne s’agit cependant pas de nous brandir en modèle ce médecin de campagne consciencieux, ni d’en faire un martyr de la profession. Mais, s’il ne fait pas l’unanimité, il ouvre tout de même bien des perspectives. Et ça fait du bien.

De la médecine, je ne connais ni la théorie ni la pratique. Je ne connais que mon expérience. Et, finalement, c’est déjà beaucoup. Nombreux sont les médecins à oublier qu’ils s’adressent à quelqu’un. Nombreux sont les médecins à oublier de s’adresser à quelqu’un. Avec ses romans, Martin Winckler s’insurge. Et cela fait échos à nos propres souffrances, à l’incompréhension à laquelle on peut se heurter. Encore une fois, ça fait du bien. Et du bien, il n’y en a jamais assez alors… lisez.

Du même auteur, lisez Les Trois Médecins.

Découvrez aussi Dolce Agonia de Nancy Huston et La Fille du docteur Baudoin de Marie-Aude Murail.

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